Faits divers

Parfois il se passe des choses terribles dans les villes de mes lubies. Outre l’antre du psychopathe que j’ai trouvé sur un terril d’Avion le 14 avril et dont je parle ici, des repérages en vue immersive peuvent amener à des découvertes assez terrifiantes :

Et ça se passe rue de la Bastille.

Résistons

Vous avez le devoir de travailler, puis de vous calfeutrer chez vous, autrement dit de vous ranger dans un vestiaire hermétique jusqu’au lendemain, où vous aurez le devoir de travailler, quelques risques que ça vous oblige à prendre. Car on vous menace, si vous ne pédalez pas jusqu’à la mort pour relancer l’économie, de vous sucrer la sécurité sociale et même de vous laisser agoniser sur la bande d’arrêt d’urgence en cas d’accident – la menace est à l’image des mesures imposées, si arbitraire, hypocrite et inepte qu’on ne saurait par quel bout la prendre pour en contester la pertinence. Vous n’osez pas sortir de chez vous pour y pratiquer les autres activités (aussi solitaires et isolées soient-elle) qui font d’ordinaire le sel de votre vie car on (le même on totalitaire) vous menace alors de  punitions dont vous n’auriez pas les moyens (on aime la menace, d’une voix doucereuse). Mais on soigne le lobby des chasseurs alors on accorde aux crevures une dérogation afin qu’ils puissent s’adonner sans entrave à leur loisir sanguinaire, sous les prétextes captieux déjà évoqués ici. Donc non, votre réclusion ne permet pas aux animaux de profiter un peu, pour une fois, des forêts, des prairies et des champs qui leur appartiennent au moins autant qu’à nous. Il existe une pétition contre cette nouvelle abjection, vous pouvez la signer ici. Merci.

Carrie et Ricah organisent une manif. J’y serai. Nous comptons sur vous.

 

JC+47

3 mai, Dame Sam a 90 ans en ressenti chat, elle miaule en boucle, toujours le même son, sans fin jusqu’à ce que je me lève, puis une fois qu’elle a bu au robinet, elle recommence. Elle boit, elle miaule, elle boit, elle miaule, ad lib.

J’allume mon téléphone ; un mail des impôts m’annonce que je peux faire ma déclaration en ligne et je m’aperçois que je n’ai pas reçu les sommes à déclarer par mes éditeurs ; et qu’il faut que je me concentre pour n’oublier aucun déplacement que j’ai fait en 2019, aucun chèque de 127 euros. C’est ça aussi, écrivain : une déclaration d’impôts non préremplie. Et c’est recevoir un mail de l’Urssaf m’invitant à créer mon compte sur tel site mais pour y accéder il faut un code d’activation qui ne me sera adressé, par courrier, que quand j’aurai créé mon espace personnel sur le site. Reçu le 30 avril : un mail disant « Vous m’avez adressé le 6 janvier 2020 un courriel relatif à l’obtention d’un numéro SIRET. » J’y réponds, soulagée, avant de me rendre compte que le mail émanait de veuillez-ne-pas-repondre@urssaf.fr. Pour répondre ? C’est simple : « Vous pouvez nous écrire depuis votre espace sur www.artistes-auteurs.urssaf.fr, rubrique « messagerie ». Ce sont des littéraires, ils ont lu leur Kafka.

Le déconfinement, ce sera ça aussi – outre que mon amour va regagner sa vie parisienne. Véto. Impôts. Urssaf. Remplacement de machine à laver. Travaux. Dossiers en cours. Signature notaire. Relevés de compteurs. Appels à l’assurance, aux eaux du Nord + électricité + gaz pour résiliation de comptes (je ne connais même pas le nouveau nom des opérateurs que j’avais choisis il y a 7 ans et demi, je n’y comprends plus rien, je suis perdue, comme une personne âgée seule et gâteuse). Etc. Tant de choses qui font regretter d’être un être humain.

Ces pensées méritent bien un Far West muré.

En attendant, je fais ma lessive à la main et, mon amour s’étant blessée en terrassant le jardin hier, je poursuis seule cette entreprise ridicule, sans fin. Je ne me rappelle pas pourquoi je me suis lancée dans une tâche qui me détruit le dos et me prend tant de temps que je ne peux même plus m’offrir le luxe de courir.

En bêchant, je me dis que je n’aimerai pas non plus être un ver de terre. Rien de spéciste, juste, je préfèrerais vivre dans le ciel ou dans l’eau que dans la terre, je suis claustrophobe. Je ne peux pas rêver d’être un ver de terre, me dis-je, et soudain j’ai mal au cœur parce que je me dis que sans doute, personne ne rêve d’être un ver de terre.  C’est ridicule : les vers de terre s’en tamponnent le coquillard, de ne pas faire rêver de grands crétins tels que nous, qui doivent résoudre des casse-têtes du genre Urssaf – on ne les fait pas rêver non plus, j’en suis persuadée. Soudain, je me rappelle une chanson de Bascom Lamar Lunsford, I Wish I Was a Mole in the Ground, sortie en 1928 ; certes, une taupe n’est pas un lombric, mais j’aime penser qu’un être humain puisse rêver de vivre dans la terre et je m’en rassure un peu hâtivement, sans entrer dans les détails.

 Mon texte sur les terrils m’échappe tout autant que le jardin.

Aujourd’hui, je me flanquerais bien un coup de bêche dans le crâne, qu’on n’en parle plus.

Je décide de sacrifier ce journal de déconfinement de toute façon sans intérêt pour ne pas perdre encore plus de temps que ce foutu jardin ne m’en fait déjà perdre. Et puis c’est bien de m’arrêter à JC+47, parce que 47 est un nombre premier, ce que n’aurait pas été 54, si j’avais attendu le dernier jour du confinement.

Quittons-le sur ces emplacements publicitaires disponibles – c’est ma manière de souhaiter le meilleur au monde d’après.

JC+46

Nous avons décidé de consacrer notre week-end au jardinage, mais avant toute chose, nous n’avons pas d’autre choix que d’entreprendre des travaux de terrassement – manuels. Comme j’ai plus de muscles dans les jambes que dans les bras, j’improvise une technique pour retourner la terre, qui consiste à sautiller sur la bêche. Ensuite, il faut frapper longuement chaque bloc avec une serfouette ou une griffe (puisque ce sont les outils dont nous disposons) pour détacher la terre des racines. C’est moins fastidieux que l’extraction des adventices pièce par pièce.

(Force est de constater que les plantes qui s’en sortent le mieux dans le jardin sont celles auxquelles je n’ai pas touché.)

Il est difficile d’épargner toutes les vies qui grouillent là-dedans : diverses sortes de vers, de chenilles, de coléoptères et une multitude de minuscules fourmis jaunes (mais qu’est-ce que c’est ?) Nous faisons notre possible pour blesser le moins possibles de ces habitants de la terre. Nous comprenons que nous n’aurons pas terminé à la fin du week-end – et quand nous pensons à toutes les étapes qui suivront celle-ci, nous sommes un peu fatiguées. Notre voisine, Peggy, va plus loin : Vous n’aurez jamais fini, soupire-t-elle. Par ailleurs, nous avons des douleurs un peu partout – avec une dominante lombaire en ce qui me concerne, pour la seconde fois du confinement.

Nous partons en promenade en fin d’après-midi mais devons renoncer, en cours de route, à saluer nos lapins : nos corps ne tiendront pas en un seul morceau jusqu’à notre spot secret. En désespoir de cause, nous allons faire quelques courses. Nous croisons Peggy trois fois. Elle est au téléphone mais chaque fois nous reprenons notre échange discontinu en riant. Ils ont de bons vins, ici, me lance-t-elle alors que j’attends masquée devant les Vins Gourmands.

Un emplacement publicitaire disponible au Far West de Loison-sous-Lens.

JC+45

Au réveil, je cherche un mot. Le mot par lequel ma grand-mère Lucette désignait la brioche qu’elle achetait chez Maillet, le boulanger de son village Vendin-les-Béthune. Alors que je respire les cheveux de mon amour et que j’ai cessé de chercher, le mot me revient spontanément : pain-gâteau. Je suis pétrifiée à l’idée que j’aurais pu l’oublier – à l’idée que je pourrais perdre la mémoire de ce qui a fait la saveur particulière de ma vie.

Pour l’instant, ça va.

C’est le 1er mai alors voici une photo de mon muguet – inutile de le couper pour jouir de son parfum et de ses belles petites clochettes.

La fête du travail est aussi l’occasion de signaler l’existence, dans le bassin minier, de parcs d’activités – de grande(s) activité(s), même – dont l’un côtoie notre spot de lapins secret ; un autre, encore plus près de chez moi, est le bien nommé Parc d’Activités Les Oiseaux.

Le 1er mai, c’est aussi le salon du livre d’Arras, qui cette année a lieu sur un site Internet intitulé Le monde d’après. J’y ai participé, comme presque tous les ans, cette fois sous forme d’un texte qui livre ma vision lumineuse du monde d’après. Je me réjouis que la comédienne Lyly Chartiez en ait fait une super lecture, que l’on peut entendre ici.

Dans le monde d’après, je pourrai de nouveau courir ici comme dans le monde d’avant. C’est déjà pas mal.

Le 1er mai, c’est aussi le jour où je lance deux nouvelles rubriques, pour me faire pardonner d’avoir abandonné successivement toutes les autres, et je sais que Le gant du jour vous manque tout particulièrement. Ces nouvelles rubriques seront officieuses, c’est-à-dire qu’elles ne seront si systématiques ni annoncées en gras. Elles seront consacrées respectivement aux emplacements publicitaires disponibles et au Far West du bassin minier. C’est parti.

Emplacement publicitaire disponible

et Far West. Voilà, comme on dit.

Le 1er mai, nous travaillons activement la terre, mon amour et moi, faisant avec nos muscles le travail d’outils aux noms barbares tels que scarificateur ou aérateur-carotteur, dont nous ne disposons pas. Nous avons quatre outils dont deux ont perdu leur manche. Nous voulons notre prairie mellifère, nous allons tout donner. Le soir, nous avons tout juste la force de prendre l’apéritif en écoutant du jazz et en regardant ma rencontre avec Amandine Dhée à la librairie la Forge en direct sur la chaîne Youtube de ma filleule (je suis marraine de La Forge, mais pas de ma nièce – qui, quant à elle, a une chaîne Youtube consacrée à son cochon d’Inde Noisette). Merci à Gwenaelle Bel pour cette initiative.

JC+44

Alors que ma première consultation médicale par vidéo vient de s’achever, avant que je ne m’aperçoive que l’ordonnance ne dit pas la même chose que le médecin pixelisé la minute précédente (je n’aime pas le vingt-et-unième siècle), je surprends un chat en pleine tentative de meurtre et descends l’escalier en courant. L’assassin relâche la tourterelle, qui s’envole dans une nuée de plumes, et je poursuis le chat jusqu’au fond du jardin en criant, Ne remets pas les pattes ici, saleté ! Un peu plus tard, je le vois discuter paisiblement sur le mur du jardin avec le chat pelé qui voudrait que je l’adopte et je lève le poing. Mon amour menace de lui envoyer une racine de pissenlit et il s’enfuit.

En 2004, j’ai sauvé un bébé tourterelle des griffes de mon chat bien-aimé Joe ; pendant un mois, chaque jour, j’ai couru avec Léopold posé sur le dos de ma main pour l’aider à s’envoler (c’est ce qu’on m’avait conseillé – et aussi de le lâcher depuis le haut du mur, ce que j’ai fait, avec pour conséquence qu’il est tombé par terre le bec le premier), jusqu’au jour où il a réussi. Un merle que j’ai brièvement appelé Albert n’a pas eu autant de chance. Ci-dessous, une photo de Léopold et moi. J’avais trente ans.

Ce soir, mon amour et moi marchons dans les rafales de pluie glacée puis au soleil puis sous les cathédrales de nuages noirs jusqu’à notre terril secret, où peu de nos congénères ont dû se promener aujourd’hui, de sorte que nous voyons vingt-trois lapins, malgré la luxuriance de la végétation. Nous exultons.

Pour la première fois, nous passons auprès du pont rouillé de la rue Edison sans qu’un soleil écrasant m’empêche de le prendre en photo, alors le voici.

Aujourd’hui, la circulation automobile me semble insupportable et j’ose à peine imaginer combien je serrerai les dents quand elle aura repris son rythme habituel. Nous apercevons un groupe de six ados qui traînent la patte en capuche comme au bon vieux temps ; un car de police passe à côté d’eux sans sourciller. Avons-nous raté quelque chose ?

Autour de moi, nombreux sont ceux que la perspective du déconfinement ne réjouit pas.

JC+43

Aujourd’hui, mes jambes sont boursouflées par les morsures d’araignées. Je prends mon texte en cours et je le plie et je le casse pour voir si ça produit de la lumière. Il ne pleut pas au moment où je cours, on pourrait prendre ça pour une grâce accordée par le ciel mais j’aime courir sous la pluie, à la belle saison, et aujourd’hui je m’agace d’avoir trop chaud. Danny court avec moi, nous sommes des animaux d’habitudes. J’ai l’impression que nous nous connaissons bien, maintenant, et j’oublie presque que cet ami est un âne. J’écoute Jarboe blues, Jarboe metal, Jarboe  expérimentale (Jarboe a grandi à la Nouvelle-Orléans, ses deux parents étaient des agents du FBI et elle a assisté, enfant, à des cérémonies religieuses incluant des manipulations de serpents), je la mets seulement sur pause le temps de traverser le terril du psychopathe – je veux garder mes sens en alerte. Je passe toute cette traversée à chercher des angles de fuite au cas où je serais confrontée à ce que j’imagine sous forme d’une silhouette massive, haute et carrée, hirsute, avec une hache ou un bidon d’essence à la main.

Je suis dans le mauvais film. Ma meilleure amie étudie les pandémies. Ce soir, en vidéo, elle nous expose diverses conclusions possibles. Je n’ai pas suivi les infos depuis plus de trois semaines maintenant et tout ce que j’apprends est de seconde main, parfois interprété par des cerveaux hyperactifs, de sorte que pour moi, désormais, le coronavirus est une création humaine échappée d’un labo P4 à Wuhan, où travaille le mari de l’ancienne ministre française de la santé. Je me demande si c’est une donnée largement répandue et considérée comme fiable et indiscutable ou si, à supposer que j’aie l’envie + la possibilité de me trouver en société, on me dirait conspirationniste. Ça m’est égal de toute façon.

Jarboe avec Helen Money, Hello Mr Blue

JC+42

Nous poursuivons notre jardinage, assistées par Dame Sam que l’on aperçoit ici en arrière-plan alors qu’elle va tasser le tas de déchets verts – qui sera bientôt plus haut que moi. J’ai un accès de mélancolie quand je vois ce nid d’oiseau abandonné, bardé de plastique. Je hais le plastique.

Nous travaillons beaucoup, aussi, chacune sur notre ordinateur, puis vient l’un de nos moments préférés : la promenade du soir. En sortant, je me sens privilégiée quand nous découvrons que la maison est la seule de la rue devant laquelle un coquelicot ait décidé de pousser. Quel honneur !

Ce gant est, je pense, le premier que nous ayons croisé au spot de lapins, où il rejoint l’équivalent de ce qu’un camion-poubelle plein aurait pu déverser sur la pente du terril – avant l’ère du tri sélectif puisque le verre et le papier s’y mêlent aux divers plastiques.

Là-haut, par chance, c’est très propre. Là-haut, ce n’est pas à cause des détritus qu’on ne voit plus tellement les lapins mais en raison de l’épanouissement des ombellifères et des orties blanches. Je suis en short, c’est vivifiant.

Vers l’ouest, la vue est particulièrement belle aujourd’hui.

L’annonce que nous n’avons pas écoutée soulève chez nous quelques réflexions douloureuses. Je crains le déconfinement autant que j’y aspire. J’ai hâte de revoir mes proches, de faire des virées sur Mon Bolide, de courir dans la nature, de me débarrasser enfin de ma maison lilloise (sept mois après la signature du compromis), etc., mais je ne veux pas être séparée de mon amour. J’ai pris l’habitude du luxe qu’est sa présence auprès de moi à chaque instant : comment y renoncer pour reprendre le fil discontinu de notre vie habituelle ? Je vais sans doute devoir la séquestrer.

JC+41

Adieu jardin mellifère : ma voisine a demandé incidemment à mon amour quand nous avions l’intention de tondre la « pelouse », se disant dérangée par les aigrettes de pissenlits. Pour la première fois en 45 ans de carrière sur cette planète, je passe donc la tondeuse. Je vois les pâquerettes et les pissenlits disparaître, broyés sous le bruyant engin, et ça n’a aucun sens ; je vois fuir les abeilles, guêpes, bourdons et papillons, espère que je ne massacre pas trop d’insectes, pas trop d’escargots, de limaces et d’araignées en même temps que je décapite ces belles fleurs.

Nous décidons de conserver un espace de liberté à l’usage de toutes ces espèces, au fond du jardin, autour du figuier qui a vécu sept ans dans ma cour commune à Lille et qui s’épanouit aujourd’hui en pleine terre. Malgré tout, mon amour et moi sommes déprimées ; nous décidons de semer des graines de fleurs des champs avant la pluie pour racheter cette barbarie, rêvons de nous réveiller un matin pour trouver une prairie piquetée de couleurs et des insectes encore plus heureux bourdonnant à sa surface.

Que regarde mon amour, au retour de la jardinerie ?

Un oiseau.

Et, près de chez nous, il y a un zeppelin.

Moins aérien : en route, nous croisons un gant XXL. Plus grand que mon pied (pointure 39,5). Où est Oasis ?

De retour à la maison, nous jardinons jusqu’à ce que le croissant de lune devienne flou. Vous êtes acharnées, ce soir, commente ma voisine. Il est vrai que mon amour mériterait autant que moi la devise que mes amies m’ont attribuée, il y a bien longtemps : Toujours tout dans la mesure.

Par ailleurs, je suis inquiète. Dame Sam montre des signes de sénilité alors qu’elle doit vivre pour toujours et la poulette de Danny a disparu depuis une dizaine de jours – je ne suis pas sûre de vouloir savoir ce qu’elle est devenue.

JC+40

Nous partons tôt de la maison, pour éviter les promeneurs du dimanche. Nous ne sommes pas venues au bord de la rivière depuis trois semaines et découvrons que la végétation est en train de tout manger, y compris l’escalier biscornu qui nous amène au bord de l’eau.

Nous surprenons un concerto de grenouilles – à moins qu’il ne s’agisse des fameux crapauds calamites qui peuplent en abondance les terrils – qui rivalise avec le conciliabule des oiseaux. Quand nous approchons de l’étang, tout le monde se tait, pas trace des batraciens, que l’on devine facétieux (je refuse de croire que nous puissions inspirer la méfiance).

Nous trouvons plusieurs cirques de poteaux dont le mystère n’est pas loin d’égaler celui des agroglyphes : was ist das ? Au fond, je n’ai pas envie de le savoir, je préfère laisser vagabonder mon imagination. Un marcheur nordique nous interpelle en pleine nature. Nous nous immobilisons comme des chats sur le qui-vive, pensant qu’il s’agit d’un policier (il est bleu marine) et j’aiguise mon regard le plus assassin. Un mètre de distance ! nous crie-t-il. (Nous nous tenons la main.) Non, je plaisante, ajoute-t-il. Je regrette de ne pas avoir fait semblant de rire quand l’idée me vient, qu’il pourrait nous dénoncer.

Le bonheur, qu’est-ce sinon marcher avec l’amour de sa vie sur un petit chemin au bord de la Souchez ?  Un moment, j’oublie que la fin du confinement approche, qui verra ce trésor regagner sa vie parisienne ; je savoure le fallacieux mais exquis sentiment d’éternité qui ramollit les zones les plus sombres de mon âme et les transforme en pur miel.

Au bord de la véloroute quasi déserte, cette maison à laquelle je trouve un petit côté western.