Sur Instagram aujourd’hui, la librairie La Madeleine (Lyon) a posté ces images de la rencontre de septembre, avec Wendy covidée sur un écran. Ci-dessous, qui est cette belle brune aimantée par l’objectif ? Mais c’est la légendaire Valentina. Autour d’elle, pas moins de trois poétesses, Flora, Béatrice et Katia, et ma pote Mya.
Mon amoureuse a un sourire un peu énigmatique sur la photo ci-dessous – elle dit que c’est parce qu’elle est très concentrée.
Depuis une semaine, j’ai repris l’écriture de Nue, après avoir laissé reposer le début de mon manuscrit pendant une dizaine de mois. J’avais une cinquantaine de pages, dont j’ai supprimé une petite moitié avant de poursuivre. Cette fois, je pense avoir trouvé l’axe qui me convient pour avancer. Voici quelques pages de mes carnets, citations et commentaires qui esquissent à mes yeux un ruban de Möbius écologique. J’illustre ce billet par deux photos (très mauvaises puisque prises très tôt avec un téléphone portable au cours de mes courses à pied) illustrant la désorientation d’homo sapiens 2.0 face à ce que l’on appelle pompeusement la nature en ville et qui, à leur manière modeste, soulèvent aussi la question, Par où commencer ?
1. Extrait d’un article de Gaspard d’Allens sur le site Reporterre, 21 juillet 2022, Les vieilles forêts, un trésor en danger
« Des forêts menacées par l’industrie forestière
(…) aujourd’hui, les coopératives forestières sont aux aguets. Une récente loi leur a donné accès au cadastre et elles démarchent de plus en plus les propriétaires. À l’échelle nationale, les plans prévoient d’augmenter les prélèvements en bois de 70 % d’ici 2050. Tout conduit au productivisme… et à la coupe rase. Sophie Maillé s’en désole : « Pourquoi couper maintenant ces vieilles forêts alors qu’elles ont été préservées par les anciens et oubliées jusque là ? On perd un patrimoine inestimable, on brise des cycles naturels qui mettront des siècles à réapparaître. C’est un terrible gâchis ». Parmi les forêts qu’elle a inventoriées, une bonne partie sont en danger. En Occitanie, 80 % des vieilles forêts de plaine et 14 % de celles de montagne sont, à terme, menacées.
« Le vivant n’a pas besoin de nous. C’est nous qui avons besoin de lui »
« On fait la course. On se démène mais on ne gagne pas toujours, dit la jeune femme. Nous, on propose aux propriétaires de protéger leur forêt, mais en face les entreprises font miroiter un chèque. » La bataille est inégale d’autant plus qu’il faut parfois déconstruire certains préjugés. « On affronte des blocages socioculturels très ancrés. On croit encore trop souvent que l’homme serait indispensable à la nature. » L’idée qu’un fragment du monde soit laissé à lui-même terrifie. « On nous parle de forêt propre, on postule que les écosystèmes non aménagés seraient inaccomplis ou défaillants. Il faut déconstruire cette forme d’“écopaternalisme”. Le vivant n’a pas besoin de nous. C’est nous qui avons besoin de lui. »
2. Savourons la manière dont l’article ci-dessous dissone avec celui que nous venons de lire. Où l’on apprend que l’ONF est, lui aussi, un vendu au lobby des chasseurs, un organisme hypocrite et hautement spéciste / réactionnaire qui estime logique de faire payer à des innocents les conséquences des activités humaines et dit en substance, Vous voyez bien que nous sommes obligés de tuer les animaux sauvages : ils s’alimentent. Ils mangent les jeunes arbres que nous plantons pour compenser les méfaits de l’exploitation sylvicole, de l’agriculture intensive et autres causes d’artificialisation – toutes humaines. Bref, voici l’extrait promis :
« Cerfs, chevreuils, sangliers… Trop d’ongulés nuit aux forêts
L’Office national des forêts (ONF) explique pourquoi la chasse, une activité parfois incomprise du grand public, est nécessaire au renouvellement de la forêt.
La chasse, on peut l’aimer ou la détester. Mais une chose est sûre : en l’absence de grands prédateurs*, cette activité, gérée par l’ONF dans les forêts domaniales françaises, est indispensable à l’équilibre et à la bonne santé des écosystèmes forestiers. (…) Le danger pour les forêts est réel. Présents en trop grand nombre, ces animaux consomment en quantité importante les jeunes arbres, compromettent ainsi la croissance et le renouvellement des peuplements forestiers et appauvrissent la diversité des essences, notamment celles adaptées au changement climatique. »
(C’est l’ONF qui souligne.)
* Grands prédateurs qui, faut-il le préciser ? ont été décimés par la chasse. Ainsi, parce que nous prenons conscience un peu tard que leur habitat, dont nous avons détruit l’équilibre, est vital à notre petit nombril d’homo sapiens, les animaux doivent être traqués systématiquement – parfois, ce n’est pas bien compris du grand public un peu simplet que nous sommes.
Mon passage préféré :
« Les 4 principaux dégâts forestiers causés par les grands ongulés
Le vermillis (affouillement du sol) du sanglier. Avec son groin, appelé boutoir, le sanglier fouille le sol à la recherche de vers et de fruits forestiers (glands, faines…). Ce faisant, il déterre les jeunes semis forestiers (chêne, hêtre, sapin…), ce qui peut nuire fortement à la régénération de la forêt.
L’abroutissement du cerf et du chevreuil. C’est-à-dire que l’animal consomme les bourgeons, les feuilles, les aiguilles ou les jeunes pousses des arbres à portée de dents.
L’écorçage des arbres. Les cerfs peuvent se nourrir de lambeaux d’écorce du tronc, notamment quand ils sont en sureffectifs.
Le frottis du cerf et du chevreuil. Les mâles frottent leurs bois en croissance aux jeunes arbres et arrachent l’écorce, cassant parfois la tige. »
Autrement dit, les animaux sauvages sont coupables de ne pas avoir des mœurs humaines ; coupables de s’alimenter ou encore de se frotter contre les arbres, plutôt que de se faire livrer des burgers par des esclaves, de laver leur voiture à l’Éléphant Bleu en pleine sécheresse ou d’illuminer les devantures de leurs magasins la nuit – entre quelques millions de petits gestes qu’ils feraient mieux d’apprendre.
Lire l’article intégral ici, ou pas. On peut se l’épargner sans regret.
3. Extrait du livre de Rémy Marion, L’ours, l’autre de l’homme, Actes Sud, 2018 :
« En 2017, 500 000 ovins sont recensés dans les élevages des Pyrénées, entre 18 000 et 30 000 meurent de chutes, d’attaques de chiens errants, de maladies, 300 morts sont attribuées aux ours, soit 1%, sans compter le dérochement à confirmer. Quand les troupeaux sont gardés, les dégâts sont négligeables.
L’ours et le loup sont des boucs émissaires du malaise des habitants des montagnes qui hésitent entre modifier leur économie et un mal-être pseudo-traditionaliste.
L’ours et au centre de luttes d’influence. Deux blocs qui n’ont rien à voir avec une quelconque couleur politique s’affrontent. D’un côté, des élus locaux et du monde agricole qui militent pour une destruction de l’espèce portée par un lobby de chasseurs et d’éleveurs** réactionnaires. De l’autre, des écologistes et une société civile qui voudraient se persuader que des ours sauvages et libres dans un massif français sont un signe de bonne santé écologique. »
** Je n’ai jamais estimé utile de le préciser mais je n’ai pas plus de tendresse pour les éleveurs, les ouvriers d’abattoirs et les bouchers que pour les chasseurs.
***
Pour finir ce billet sur une note humoristique, voici
a. un élément de définition du prédateur que l’on trouve sur le site du CNRTL (Centre national de ressources textuelles et lexicales), qui est ma principale référence lexicologique (j’y passe en moyenne une heure par jour, comme d’autres sur les réseaux sociaux) même si on n’y trouve pas tout :
« II. −Subst. et adj.,BIOL. ANIMALE ET VÉGÉT.A. −(Animal ou plante carnivore) qui se nourrit d’espèces animales ou végétales brutalement détruites au risque de les mettre en danger. »
J’aimerais beaucoup savoir comment on peut manger quelqu’un – animal ou végétal – sans le mettre en danger.
b. des suggestions du moteur de recherche que j’ai utilisé pour écouter le grognement de l’ours
Comment on appelle un ours ? est évidemment ma préférée.
la librairie la Régulière, à Paris, est aussi la maison de Rita ; parfois, elle dort face à un public d’une trentaine de personnes, ça n’affecte pas la qualité de son sommeil
et puis parfois elle traverse la scène
pour aller aux toilettes
(merci à Jagna pour la photo de Wendy, Rita et moi)
chaque fois que nous empruntions le pont nous ralentissions pour plonger nos regards par la fenêtre au rez-de-chaussée de cette étrange maison isolée en contrebas et voir la locataire en pyjama se balancer d’avant en arrière sur sa chaise devant la télé – si près de l’écran que quand elle se penchait vers l’avant son front le touchait presque
nous faisions un gros rire avec le ventre un rire comme de l’eau qui continue de claquer contre la berge du canal encore longtemps après le passage d’une péniche mais ce rire ne pouvait empêcher le frisson de secouer nos épines dorsales or aujourd’hui je vois que l’appartement a pris feu le chat est là seul dans les cendres de pyjama de chaise et de télé l’odeur d’artefacts calcinés flotte à des centaines de mètres encore dix jours après le sinistre dont le journal local dit :
« Éleu-dit-Leauwette : quatorze personnes évacuées lors de l’incendie d’une maison
Ce samedi vers 1 heure du matin, un incendie a entièrement détruit une maison de la rue XXX. La locataire des lieux, incommodée par les fumées a été transportée à l’hôpital. Quatorze personnes vivant dans des appartements mitoyens ont été évacués le temps de l’opération de secours. »
au premier étage sur le dessus de cheminée des pommes vertes attendent qu’une fraction des quatorze évacué.e.s vienne les cueillir une seconde fois
Hier, nous avons vécu un jour de vraies vacances, où l’on se promène dans des rues paisibles de Londres avec une pause pour manger un succulent burger végétal, puis on revient tranquillement à la maison en longeant le canal et en lisant le nom des péniches.
Le soir, on mange sur le balcon en regardant les renards jouer dans le jardin
avec les artefacts en plastique mis à leur disposition par les enfants du quartier.
de Valentina, dans l’ordre chronologique de leur parution. Ce EP sort officiellement le 10 juin mais on peut déjà en trouver la version numérique, notamment ici.
Paru hier, ce premier volume d’une collaboration à distance (UK-USA) qui s’annonce prolifique. Un concentré d’énergie brute. Pour en savoir plus et écouter des extraits, cliquer ici.
Parue aujourd’hui, cette réédition chinoise de son premier album solo, augmentée d’un nouveau titre. On peut la trouver ici.
Hier, j’ai participé à une répétition de Nous avons fait un beau voyage (le titre cite une chanson de Ciboulette, l’opérette de Reynaldo Hahn). Je parlais ici de notre pièce : elle a été écrite en atelier par la troupe même qui va l’interpréter – mes super hurluberlus préférés, dont on voit quelques spécimens sur la photo ci-dessous, dans la scène des oiseaux. Je vais moi-même lire quelques phrases, de sorte que je serai un peu sur scène avec le groupe + le chœur d’enfants mené par Astrid + non pas l’école de musique au grand complet, cette année, mais notre incontournable complice Nathalie et sa fille Marie. Toutes nos pièces s’achèvent par une interpolation de La veuve joyeuse (oui, nous aimons bien l’opérette) et pour la première fois, je ferai donc partie du très grand chœur dissonant qui entonnera ces quelques vers s’achevant par Vive la raie / Vive la République – nous réglons leur sort au tourisme, à la chasse, au consumérisme, au chauvinisme, etc. Plus d’infos dans la rubrique Factuel pour celles et ceux qui voudraient réserver une place, un train, une chambre d’hôtel et venir nous applaudir.
Après la répétition, j’ai sauté sur mon vélo et filé à Lille ; en chemin, j’ai retrouvé les jeunes oies que je vous ai présentées ici en décembre. Les trois que l’on voit ici dans l’eau ont mis en fuite un canard, qui a fini par s’envoler pour leur échapper.
J’ai croisé de nombreuses péniches que je ne connaissais pas encore, parmi lesquelles Octopus, St Eustatius, Gwendolina, Florida, Kevalia, Tsunami ou encore Alain, mais la première à s’être trouvée sur mon chemin a conforté ma théorie de la divination batelière puisqu’elle s’appelait Freedom et que j’éprouve précisément, ces temps-ci, un sentiment d’intense liberté. Il y a trois nuits, j’ai rêvé que j’étais un chevreuil et que je gambadais joyeusement au milieu des miens dans la nuit tout juste baignée de lune, quand soudain des phares de voiture ont éclairé ce que nous pensions être une prairie, alors nous nous sommes rendu compte que nous étions sur un rond-point ; ce rêve me dit qu’il faut rester prudente mais ignorer la déception que nous impose le regard de la civilisation, ignorer autant que possible ses problématiques pour jouir de la beauté que nous générons entre chevreuils, tant que nous le pouvons. J’ai appris ce matin avec perplexité le décès de la musicienne expérimentale Mira Calix (52 ans) et, outre la tristesse que j’en éprouve, je me répète qu’il ne faut rien concéder à ceux qui voudraient disposer de notre temps ; il est bien assez court.
À Lille, en compagnie de mes amies Antique, Claire et Lulu, j’ai assisté aux concerts de ces drôles d’oiseaux que sont Mega Bog et Cate Le Bon et j’ai passé un moment formidable. Entendre cette dernière interpréter, à deux mètres de moi, les chansons de son précédent LP, Reward, l’un des trois albums qui m’ont sauvé la vie en mars-avril 2021, m’a procuré des émotions bien plus fortes que je ne l’avais escompté ; j’avais très envie de pouvoir remercier la dame parce que, décidément, ça valait le coup de survivre à ce merdier.
Le moment était d’autant plus fort qu’elle jouait devant un public très confidentiel – moins cependant que celui de Mega Bog, qui d’ailleurs ne se sentait pas très bien : outre que le public clairsemé n’était pas réactif, elle n’avait pas son groupe au grand complet autour d’elle et m’a confirmé qu’il lui avait beaucoup manqué. Je lui souhaite plus de fun ce soir à Paris en plus grand effectif. Il est toujours étonnant, pour moi qui n’ai aucun lien avec la presse et la culture françaises, de constater que les superstars de mon monde ne remplissent pas une salle ici. Chaque jour, je me réjouis de vivre mentalement ailleurs.
Elles et Eliot vont me manquer. Cette petite assemblée de personnalités inhabituelles. Nous avons passé trois jours en échanges incessants sur les processus de création, trois jours de discussions sans fin. Quelqu’un m’a dit que, depuis la salle, on entendait les rires qui provenaient de mon « cabinet » et qu’on se demandait ce qui se disait, là-dedans. C’était le son des univers qui s’étiraient, qui faisaient craquer leurs articulations, qui se demandaient ce qui viendrait ensuite – et cette question ne trouvera jamais de réponse, heureusement.
Après cette photo souvenir, nous avons de nouveau envahi un bistrot, cette fois nous étions 17 et nous avons bu 17 thés à la menthe. Puis j’ai eu le bonheur de retrouver mon amie Mel, que je n’avais pas vue depuis six ans <3
Hier, je me suis octroyé un RTT pour me rendre à Lille à vélo par les chemins de halage. Je n’avais pas eu l’occasion de les emprunter depuis longtemps et les parcourir était un tel bonheur que je suis devenue quelque peu lyrique, me disant, Ce monde est mon monde – non pas le mien exclusivement, comprenez-moi bien, mais aussi le mien ; je me sens la plupart du temps si peu à ma place que ces épiphanies me sont terriblement précieuses. J’ai croisé un grand nombre de péniches, certaines que je connaissais déjà, et cinq que je n’avais jamais vues. Passons sur Cadillac et Njörd. Les trois qui m’ont interpellée sont celles-ci :
Novateur… Quel drôle de nom pour une péniche, me suis-je dit, sans plus, et je n’ai pas davantage réagi quand j’ai croisé Vaya Con Dios (il m’en faut plus qu’à l’époque où j’aimais voir un bon présage quand je croisais Bon Espoir, Serenitas ou Good Luck),
mais quand Futura est venue insister, j’ai compris que ces péniches m’annonçaient quelque chose. « C’est bientôt », me souriaient-elles. Très bien, je suis prête. Je l’étais tellement hier soir que j’ai été surprise de ne pas rencontrer le grand amour dans le bar où je retrouvais des amies – et où la moyenne d’âge hélas était de 26,5 ans – puisque pour le reste, j’ai tout ce qu’il me faut. Comme le dit la chanson des Gershwin,
Somebody loves me I wonder who I wonder who she can be
Je suis pour trois jours chez Aude Rabillon, que j’observe dans son quotidien de créatrice sonore et avec qui j’ai des discussions très riches (ce qui ne nous empêche pas, comme à la Factorie avec les poètes, de faire une boum le soir avec son fils de 7 ans). Hier, elle profitait de ce que le Musée des Arts était fermé pour choisir la salle où, le 3 mars, elle jouera en duo avec la violoncelliste Soizic Lebrat (qui figure également dans mon répertoire de créatrices sonores). Je les ai donc suivies dans le musée désert et, tandis qu’elles testaient l’acoustique des salles, j’en profitais pour entendre de très belles choses. Je me sentais très privilégiée…
Cette salle, parce qu’elle est dévolue à l’art contemporain, nous semblait plus appropriée que les salles plus classiques mais, la soufflerie n’émettant pas sur la même fréquence que leur duo, elle l’aurait ruiné.
Nous avons plaisanté sur le fait qu’il faudrait inverser les collections, la salle finalement retenue étant très classique mais aussi et surtout très masculine, et Claire a dit « Quand même, il y a des femmes qui tiennent la route – regardez, Vénus… » Ce qui a naturellement achevé de nous convaincre.