Cinzano exquis

Mes ami-es et moi, nous avons écrit des cadavres exquis la veille de la sortie de résidence, afin de pouvoir faire une lecture à cinq – et non six, hélas, Aurélien étant déjà parti.

Voici la sélection de cadavres exquis que nous avons lue à la fin de notre sortie de résidence :

Emné
je ne bouge plus de la table mais je cherche tout de même le sanglier
Fanny
un précepte de Yogi Tea est collé au fond de l’évier
Valérie
je le gardais dans ma poche pour les jours de pluie
Philippe
danser avec un parapluie dans la poche c’est rigolo mais c’est pas beau
Willhy
qu’importe tant que tu danses entre les gouttes entre les mots, sous tes paupières closes

Fanny
je réside dans le mouvement perpétuel
Valérie
elle est le lieu des grandes envolées
Philippe
on a bu du rhum il y avait des petits enfants dedans ils avaient les yeux brillants
Willhy
là où réside la rivière, ton chant, tes mains nues
Emné
je dois écrire encore une phrase, l’amplifier, la saturer. tout est vide

Willhy
habiter tes yeux dans la nuit fragile
Emné
chercher le centre et m’y piquer
Fanny
je veux occuper l’espace à la manière de la poussière
Valérie
avec en son centre l’histoire de mille vies
Philippe
les danseuses font des gestes de l’autre côté de la poésie

Valérie
le groupe était stupéfait devant l’absence d’une consigne
Philippe
on s’est levés debout sur les tables et on a fait des signes aux fantômes
Willhy
légender des rivières et fleurir nos morts sur les coutures de l’aube
Emné
regarder la surface des mots et ce qui lie
Fanny
les corps élastiques dans le pourpre et l’or de la Factorie

Emné
je veux habiter l’angle d’une voyelle et écrire notre friction
Fanny
je veux être dehors et je veux être dedans tout à la fois
Valérie
peut-être cage grande ouverte
Philippe
il y a des fantômes dans la chambre mais je n’arrive pas à engager la conversation
Willhy
il me faut revenir au lieu premier des amours, là-bas

Le dernier orne désormais une surface dans la cuisine de la Factorie, parmi les traces de dizaines d’autres poètes:

Je ne suis plus triste de la séparation, je suis surtout heureuse et reconnaissante du temps passé en la compagnie de ces merveilleux êtres humains qui, presque, me réconcilieraient avec mon espèce.

Une fois encore, merci infiniment à la Factorie pour ces jours inoubliables.